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La France, nouvel eldorado du Millî Görüs (Vision Nationale)

« Les Européens sont malades… Nous leur donnerons les médicaments. L’Europe entière deviendra islamique. Nous conquerrons Rome. » Necmettin Erbakan, ancien Premier ministre turc et fondateur du Millî Görüs (Vision Nationale).

L’islamisme turc est à la fois médiatisé et méconnu. Médiatisé de par l’accès au pouvoir du Parti pour la justice et le développement (AKP) en 2002 et par le débat sur l’entrée de la Turquie en Europe. Méconnu car le public ne connaît pas des mouvements islamistes du pays leurs diverses formes, leur ampleur et leur stratégies, bien qu’ils rayonnent puissamment grâce à leurs journaux, télévisions, confréries …jusqu’en Europe. La diaspora turque installée en Europe est en prise directe avec ces mouvements qui la relient au pays, et vit largement en vase clos, reconstituant des « petites Turquie» dans les grandes villes de l’Ouest. Ce communautarisme est conforté par les tournées européennes du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan insistant sur le «crime» contre l’identité que représente l’assimilation. Lors d’un discours au Zenith de Paris plein à craquer en avril 2010, Erdogan répéta ce qu’il avait déjà martelé à Cologne un an plus tôt : »Personne ne peut vous demander d’être assimilé. Pour moi, le fait de demander l’assimilation est un crime contre l’humanité, personne ne peut vous dire: renonce à tes valeurs » tout en incitant ses compatriotes venus l’acclamer drapeau turc à la main à coloniser légalement le pays: « La France vous a donné le droit à la double nationalité: pourquoi vous ne la demandez pas ? Ne soyez pas réticent, ne soyez pas timide, utilisez le droit que la France vous donne. Prendre un passeport français ne vous fait pas perdre votre identité turque » Erdogan proposa la création d’établissements scolaires turcs en France afin de consolider leur implantation hexagonale.

En 2014, ces écoles voient déjà le jour, nous le verrons plus loin. Un sondage de l’institut PEW, en 2008, révèle que 74 % des Turcs ont une mauvaise opinion des chrétiens en général, contre 52 % en 2004. Cette radicalisation inquiétante n’épargne pas une diaspora vivant au rythme du pays, télévisions et journaux étant facilement accessibles, et le rythme des nouveaux arrivants -surtout des femmes importées pour des mariages- n’arrangeant rien.

Le Millî Görüs , Vision Nationale en français, est le principal mouvement islamique encadrant la diaspora, et également celui qui construit des grandes mosquées, avec le soutien affiché des élus. Il est donc indispensable de faire sa connaissance afin de comprendre pourquoi, par son essence islamiste, il est un danger social pour l’Europe.

Tout est parti de la volonté d’un seul homme, Necmettin Erbakan, principal acteur politique de l’islamisme turc de ces 40 dernières années. Sa première tentative de prendre le pouvoir par la voie démocratique, date de la création en 1970 de son Parti de l’Ordre national. Parti perçu comme la branche politique de la confrérie islamique Nakshibandi, ses excès programmatiques axés sur l’anti-maçonnisme, l’anti-occidentalisme, la critique de la laïcité, ne tardèrent pas à le marginaliser.
Voulant remplacer ouvertement dans les écoles publiques certains enseignements d’Emile Durkheim au profit de penseurs islamiques connus pour leur rejet des «blâmables», comme al-Ghazali (1058-1111), ou Ahmed Shirindi (1564–1624), référence de la confrérie islamique Nakshibandi, il provoqua sérieusement l’inquiétude des autorités. D’autant qu’une part grossissante d’une autre confrérie de masse, les Nurcu, commença à rejoindre ses rangs…Le coup d’état de 1971, effectuée par l’armée gardienne de la laïcité (dépositaire de l’héritage du premier président Mustafa Kemal, militaire ayant aboli le califat en 1924) régla -temporairement- le sort de la formation islamiste, et pour Erbakan, marqua le début de son exil en Suisse et en Allemagne pour nombre de ses collaborateurs, pays à partir desquels il va fomenter le retour de l’islamisme à vocation démocratique.

C’est le Parti du salut national (MSP) qui succèdera au Parti de l’ordre national, avec un Necmettin Erbakan restant dans l’ombre, recyclant les cadres du parti dissous, qui reprendra ses thèmes favoris. Il n’eut qu’à attendre 1974 pour participer à un gouvernement de coalition au terme d’un succès dans les urnes, qui permit au tout jeune parti de briguer des portefeuilles ministériels de premier ordre (Intérieur, Commerce, Justice et industrie…) et d’installer Erbakan au poste de Premier ministre. Durant cette période, son influence permet de recruter 5000 imams et muezzin à la direction des Affaires religieuse, pour la seule année 1974 !

La parenthèse européenne de Necmettin Erbakan nous intéresse grandement, car c’est lui qui posa les jalons de la diffusion de l’islamisme turc, d’abord en Allemagne où naquit le Millî Görüs, (Vision nationale), formant une base arrière stable indispensable tout au long d’un vingtième siècle rythmé par les coups d’Etat successifs et les persécutions à l’encontre des différentes formations islamistes qu’il contrôla. L’Europe allait donner, par ses généreux droits de l’homme et sa névrotique quête de «diversité», un cadre de liberté idéal afin que le mouvement se structure via ses journaux, radios et évidemment mosquées qui ne tarderont pas à pousser.

Ironie de l’histoire, lors de sa participation au pouvoir en tant que Premier ministre de 1996 à 1997 (le 28 février 1997 le Conseil de sécurité dépose Erbakan pour cause d’atteinte à la laïcité), il exprima son désaccord total à l’entrée de son pays dans l’Union Européenne, fustigeant ce «club chrétien» pourtant si hospitalier pour ses partisans. Il va sans dire que pour le Millî Görüs il est tout à fait normal, et même obligatoire, que la Turquie demeure un club musulman, plus que cela un califat. Une des affiches du Millî Görüs représente son chef, sabre au clair, faisant face à l’époque à tous les dirigeants européens, de Jacques Chirac à Gerhard Schröder.

Necmettin Erbakan est mort en février 2011. Grand ami des Frères Musulmans avec lesquelles il partage les thèses. L’édition du 3 mars 2011 du quotidien turc Hurriyet est très instructive, on y apprend les déclarations de Rached Ghannouchi -dirigeant du parti islamiste tunisien Ennhada- lors de sa présence à l’enterrement décrivant Erbakan comme « non seulement un ami, mais un grand frère ». Nous recroiserons Ghannouchi, fidèle des congrès de l’UOIF, notamment dans notre annexe 1 consacrée au mouvement.
Ghannouchi relie Erbakan aux ancêtres fondateurs et intellectuels des Frères musulmans. « Dans le monde arabe de ma génération, quand [les gens] parlaient du Mouvement islamique (note: autre nom des Frères Musulmans), ils évoquaient Erbakan. Il en parlaient comme de Hassan al-Banna et Sayyid Qutb, ajouta-t-il. »
Il avait fait son retour en politique octobre 2010, en se faisant élire à la présidence du Saadet, formation islamiste fondée en 2001 sur les cendres du Parti de la vertu (Fazilet), dissoute par décision de justice pour cause d’atteinte à la laïcité.

Près de 40 ans après ses débuts en Allemagne, le Millî Görüs, dont le logo est la carte de l’Europe enchâssé d’un croissant islamique, est devenu une pieuvre tentaculaire ayant essaimé dans tous les pays d’Europe, et la France n’est pas en reste, nous allons le voir.

Le quotidien allemand Die Ziet, dans un article consacré au mouvement en 1999, recensait déjà 500 mosquées outre-Rhin pour 26500 membres, sans parler des sympathisants beaucoup plus nombreux. La réforme du code de la nationalité en 2001, donnant la nationalité allemande à près de 2,5 millions de turcs, fut une véritable aubaine afin de peser dans le débat public et d’obtenir une oreille attentive des autorités fédérales. D’autant que l’islam obtint quelques mois plus tard d’Otto Schily, alors ministre de l’Intérieur, d’être reconnu au même titre que les Eglises chrétiennes en bénéficiant du statut très avantageux de collectivité de droit public, permettant aux islamistes d’obtenir des cours de religion dans les écoles en plus de financements conséquents!

Le Djihad, un pilier pour Vision Nationale

Necmettin Erbakan, avait souligné lors d’un discours prononcé le 13 mai 1991 dans la ville de Sivas combien le djihad est important dans la lutte pour la prise du pouvoir politique:
« Le Parti de la Prosperité (Refah Partisi) est une armée. Tu dois travailler de toutes tes forces pour que cette armée grandisse. Ce parti est l’armée de la guerre islamique. Tu ne peux pas mener tes propres actions en te disant que tu fais ta propre guerre. Les actions qui sont menées sans demander l’avis du quartier ne sont que discorde. Si tu travailles, tu travailles ici. Est-tu musulman ? Alors tu es obligé d’être un militaire dans cette armée. On ne devient pas musulman sans donner de l’argent au Djihad. Nous, nous sommes musulmans. Nous devons soutenir le Parti de la Prosperité (RP) car nous désirons le djihad. Tous ceux qui travaillent consciemment pour le Parti de la Prospérité vont au paradis, pourquoi? Parce que Prospérité signifie travailler pour faire régner l’ordre coranique » cité dans Refah partisi kapatma davasi, Istanbul, Ed.Kaynak, 1998. p287

L’AMGT a près de 400 sections. Le nombre des membres en Europe qui était de 3000 en 1981, s’élevait à 60 000 en 1996. On estime qu’elle a 31 000 membres actifs et 230 000 sympathisants. En même temps, AMGT possède 487 mosquées, 313 salles de prière et de cours coraniques. Ces mosquées, ces associations et ces fondations comptent 25 000 membres et ont des groupes dans 220 villages. Ils donnent une instruction sur la Charia à 70 000 enfants par des cours coraniques, principalement en Allemagne. L’organisation Vision Nationale qui supervise les diverses organisations qui sont structurées sous forme de fédérations et de confédérations, a la capacité d’assurer la participation de 50 000 personnes aux activités organisées au niveau central. Malgré l’effet important d’Erbakan (dirigeant le un nouveau parti, le Safilet Partisii) et de son équipe sur l’Organisation de Vision Nationale, les effets de la scission du mouvement islamiste entre l’AKP et SP ont été ressentis dans l’AMGT.
Les obligations des idéologues de Vision Nationale sont indiquées dans les documents du mouvement intitulés « les prêcheurs, les membres, les gestionnaires et les propriétés liées« . Leurs traductions sont parues dans le livre du sociologue turc Mustafa Pekoz, Le développement de l’islam politique en Turquie (L’Harmattan, 2011). Une mine d’information pour comprendre le mouvement de l’intérieur. Le contenu est édifiant :
 » 9- Chaque individu membre de Vision Nationale doit s’engager dans la guerre religieuse (djihad) sur le chemin de Dieu. Pour que le djihad se réalise avec le bien et l’existence, le membre doit tout d’abord avoir son attention tout à Dieu et se conditionner de manière à être prêt à tout moment pour le djihad.
10- Tout combattant appartenant à l’Organisation Vision Nationale doit savoir que le niveau inférieur à la guerre religieuse est de s’orienter avec son cœur vers des principes islamiques et le niveau supérieur est de renoncer à ses biens et à son existence sur le chemin de Dieu.
11- Tout combattant de l’Organisation de Vision Nationale doit se préparer à se sacrifier sur le chemin de Dieu. Car la cause réclame ses choses les plus précieuses. (note: la traduction confuse est issue du livre de Alex Mustafa Pekoz)
12- Chaque membre de l’Organisation Vision Nationale doit être conscient que sa position et sa tâche au sein de la cause forment une partie du principe de conservation qui lui est confiée. Donc il ne doit jamais abandonner sa tâche et ne jamais rien négliger.
(…)
21- Il ne faut pas confondre les objectifs avec les moyens; les intérêts de la communauté doivent être vus comme un axe de travail. La communauté est un moyen servant l’objectif de l’islamisation de la société. Lorsque l’intérêt de la communauté est prioritaire, celle-ci commence à s’occuper d’elle-même et non pas de la société. »
Ces opinions consistent à appliquer ces orientations politiques et pratiques sous n’importe quelles conditions. En particulier, les activités politiques en direction de la Turquie, sont pratiquées principalement dans cette perspective.
L’AMGT procède à des constats importants en déterminant des objectifs tels que «création des cadres d’avant-garde, devenir organisation de masse, parti et Etat». Elle classe ces tendances politiques par ordre croissant en les énumérant étape par étape. D’abord les cadres destinés à mener le processus de «nationale», puis devenir une organisation de masse, puis parti et enfin l’appel à la guerre c’est-à-dire devenir un Etat en prenant le pouvoir. Dans une circulaire publiée par la Présidence de l’Education de l’AMGT, les objectifs sont clairement énoncés. La partie intitulée Diagnostic et Traitement des Maladies de l’Organisation, définit la structure organisationnelle et indique les étapes de la transformation en Etat, de la façon suivante:
«Dynamisme de l’organisation consiste à être une organisation animée et dynamique pour atteindre l’objectif (… )L’objectif de l’organisation
a) Le but: Assurer la domination d’Allah
b) L’homme: il est croyant, laborieux, savant, patient
c) Le moyen: divers moyens sont rendus nécessaires par les conditions du terrain(…) nous devons tout d’abord nous connaître nous même, notre cause, la supériorité de la cause; nous travaillerons de tous nos efforts et nous connaîtrons les procédures et les méthodes à mettre en œuvre pour le triomphe de la cause.
L’étape de transformation en parti, en masse: les cadres du noyau sont invités aux divers centres tels que les fondations, les associations et les ordres religieux et ainsi formés commencent à se transformer en masse constituant des partis afin de servir les moyens de l’Etat et de gouvernement et de former une base plus large au moment et dans le milieu qui conviennent. L’ordre de faire le bien et l’interdiction de faire le mal, sont donnés sous l’autorité de l’Etat et du gouvernement. Alors les citoyens du pays rivalisent entre eux pour rendre service. Ce que nous exprimons n’est pas des aspirations en vain pour ceux qui respectent et obéissent aux préceptes du Coran et la promesse de Dieu.

d) La période de guerre religieuse et de transformation en Etat: les militaires bien formés par la connaissance de conscience et de sacrifice, et qui ont connu l’ordre et la discipline de l’organisation sont orientés vers le front pour l’extension, la conception et la réussite de l’objectif. Les combattants situés dans les différentes unités et divisions de l’armée morale et de l’armée politique telle que les partis, les fondations, les syndicats, les associations, les journaux procèdent à des activités intenses et infatigables pour sauver l’Homme des systèmes primitifs et des personnes méchantes (sic).
Un musulman, est celui qui se sacrifie aux ordres d’Allah. Les autres sont ceux qui écoutent leurs propres désirs. Les ordres d’Allah se trouvent dans le Coran. Parmi ces ordres il y a l’ordre du Djihad. Cet ordre ne peut pas se réaliser tout seul. Il se réalise avec la communauté des croyants (Oumma). Toute personne est obligée de participer à cette Oumma. Nul ne peut dire « je peux servir sans participer à l’Oumma » ou « nous donnerons de meilleur service dans un nouveau groupe en dehors de l’Oumma. Il est obligé de rendre le meilleur service qu’il soit à l’intérieur de la communauté des croyants »
Analyse du sociologue turc Alex Mustafa Pekoz :
«Ces approches idéologiques et ces perspectives politiques mettent en évidence les tendances stratégiques de l’islam politique en Turquie. Comme la structure politique et sociale actuelle de la Turquie ne permet pas l’islamisation du régime sur la base d’un gouvernement de Charia (plus pour longtemps depuis la révision constitutionnelle entérinée par référendum en septembre 2010 supprimant le droit de regard de l’armée laïque sur le Conseil supérieur de la magistrature et la Cour constitutionnelle, deux organes en voie d’islamisation) , les partis d’obédience islamique exerçant une activité légale, préfèrent transmettre leur vision politique par le biais de l’organisation organisée à l’étranger sous le nom de Vision Nationale. Les organisations islamistes armées dépendent presque de la même stratégie d’organisation à savoir transformation en masse, en parti, et puis en Etat. Malgré les petites différences entre eux, leur tendance stratégique est commune. Etablir en Turquie un régime basé sur la Charia est devenu l’objectif commun de tous les islamistes ».
Nail Duran, l’ancien président de la Fédération de l’islam avait indiqué que Vision Nationale n’était pas une institution religieuse mais politique:
« L’espace politique de Vision Nationale est la Turquie. Elle n’est pas une institution religieuse. L’islam dans sa définition réelle est une religion politique: il s’agit de l’ensemble des lois divines qui régissent les opinions et les actes des gens dans tous les domaines. Comme c’est la réalité, il n’est pas juste de dire que la réligion est une chose et l’Etat une autre »
L’organisation de Vision Nationale est organisée en Turquie et en Europe mais a également des relations internationales. L’ensemble des organisations avec lesquelles elle a des relations défend le régime de charia.
Parmi ces relations, il y a des organisations qui défendent la lutte armée islamique mais aussi des mouvements qui défendent la politique de prise de pouvoir par le biais de l’action politique et des réformes. Car la perspective idéologique de VN comprend le fait de se servir de la violence, toujours selon Pekoz. Par exemple l’ordre de Khomeiny de tuer Salman Rushdi avait été explicitement soutenu par Ali Yuksel, l’ex-secrétaire général d’AMGT. Ali Yuksel avait déclaré sur Salman Rushdi:
 » S’il y a de mauvaises paroles, il faut les condamner. Je pense qu’il doit être absolument condamné. Les croyances qui honorent les gens sont intouchables. Si on ne le condamne pas, on ne peut rien éviter. Personne ne peut blâmer le Prophète d’une religion d’un milliard de croyants dans le monde et sa famille. Ceux qui le blâment doivent être condamnés »
Ce point de vue est également celui de Vision Nationale. Le problème n’est pas traité religieusement mais dans le cadre de la lutte politique. Naturellement la résolution liée est traitée dans le cadre de la violence islamique, explique Pekoz.
Les Assemblées générales de l’AMGT, qui incarne Vision Nationale en Europe, se déroulent chaque années en Allemagne, regroupant une centaine de milliers de colons turcs. Il y a quelques années, le Premier ministre actuel Tayyip Erdogan assistait à l’évènement, aux côtés de Erbakan le fondateur, comme le 26 mai 1990 à Cologne où l’ambassadeur de l’Arabie Saoudite les rejoignait également amicalement.

Il ne faut pas perdre de vue que Erdogan n’est en rien un « islamiste modéré », qualificatif employé part la presse occidentale au prétexte qu’il n’a jamais employé la méthode de l’action directe mais celle de la voie démocratique. Relire les déclarations de Erdogan précédent son arrivée au pouvoir est riche d’enseignements :
« Ils s’inquiètent sans arrêt pour la laïcité. Si cette nation en décide ainsi, bien sûr qu’elle sera perdue. On ne peut pas l’éviter…99% des habitants de ce pays sont musulmans. On ne peut pas être à la fois laïque et musulman. On est musulman ou on ne l’est pas. Si l’islam et la laïcité ne peuvent coexister, ils se repoussent. Il n’est pas possible que celui qui affirme je suis musulman dise également je suis laïque. Pourquoi? Parce que c’est Allah qui est le créateur de l’islam. Il est le seul souverain. Dire que la souveraineté appartient sans condition à la nation est un grand mensonge…Lorsque les scrutins ont lieu, la souveraineté est à la nation. Mais la souveraineté appartient à Allah au sens matériel et spirituel. Ceci, nous devons bien le comprendre »
Les appels au djihad de Erdogan avaient été largement occultés lors des débats sur la question de l’entrée de la Turquie en Europe. C’est bien dommage, car les éditorialistes tels que Alexandre Adler, Jean Daniel, Bernard Henri-Lévy, Serge July, l’arc politique allant de l’extrême gauche au PS, n’auraient certainement pas argumenté de la même manière en agitant le chiffon de la xénophobie.
Ainsi, lors d’un discours prononcé dans la ville Kurde de Siirt, Erdogan avait dit en 1997 :
« Qu’est-ce que je recherche dans ce pays de martyres qu’est la Turquie si je n’arrive pas à déclarer librement ma foi ? Mes frères, je dis que ces prières ne se tairont pas! Vous avez des soucis? Nul ne peut les faire taire. Nous deviendrons un volcan, une foudre et nous exploserons devant ceux qui voudront faire taire l’appel à la prière! Il n’y a pas d’autre moyen! Nous existons dans ce but! Si on dit à ma sœur qui recouvre sa tête « tu ne peux pas faire d’études si tu ne l’enlèves pas », alors, il y a de la torture dans ce pays (sic). Ceci ne continuera pas ainsi, le droit règnera un jour »
A une autre occasion, Erdogan ne prit pas la peine d’user de métaphores géologiques et climatiques :
« Le monde musulman comptant un milliard et demie de personnes attend que la nation turque musulmane se révolte. Nous nous révolterons. Maintenant on en voit les signes. Grâce à la permission d’Allah, ce soulèvement va commencer. Tu dois te dépêcher. Tu dois travailler. Si tu ne souffre pas, cela ne se produira pas. Si vos enfants, vos femmes vous empêchent d’agir, n’attendez plus cette victoire. Tu dois dépasser tout obstacle, le jour où les dépasserons, les lumières de la victoire seront près de nous. Et alors Allah répandra sa lumière… »

Vision Nationale classé « islamiste fondamentaliste » en Allemagne, est dans l’œil du cyclone judiciaire outre-Rhin :

Le mouvement est classé comme « islamiste fondamentaliste » par le renseignement fédéral allemand (Bundesverfassungsschutz), et a été en 2003 sur la liste des associations pouvant servir de base arrière au terrorisme dans le pays. Sigmar Gabriel, ancien ministre-président (SPD) de Basse-Saxe, met le mouvement sur le même plan que le Hamas compterait « des sympathisants de Ben Laden », selon lui.
Une enquête du ministère de l’Intérieur de Düsseldorf, publiée en janvier 1999, cite un bulletin interne du mouvement : « La Communauté est un moyen au service du but – le but étant d’islamiser la société. »;  » Millî Görüs est un bouclier protégeant nos compatriotes de la barbarie européenne »; « La démocratie est une erreur occidentale ».
Le but final des islamistes est de faire reconnaître les turcs musulmans comme une communauté, comme le revendique le site internet du Millî Görüs «Nous demandons aux gouvernements européens d’attribuer un statut légal aux communautés musulmanes et de les reconnaître comme une part intégrée, nécessaire et sûre de la société».

Le secrétaire général du mouvement en Allemage? Mehmet Erbakan, le neveu de Necmettin!
Les revendications sont claires: le droit d’abattre les animaux selon leurs normes, le droit de posséder des cimetières séparés, le droit d’enseigner l’islam dans le cursus scolaire, le refus de la mixité à l’école, et l’application de la charia tant que faire se peut à leur communauté.
Depuis sa mise sous les projecteurs, le mouvement police son discours, formaté au profit des sociétés ouvertes européennes, en subvertissant les valeurs progressistes (liberté religieuse, liberté d’expression, droit du sol, libre circulation, double nationalité). Ainsi, Celik Karaken, responsable du mouvement en Allemagne, résume sa nouvelle stratégie : »Le système démocratique laïc a recouvert nos intentions. Nous avons renoncé à l’ Islam plus tard nous aviserons ».

Outre les révélations du renseignement allemand et son inscription sur la liste des mouvements dangereux en 2003, le Millî Görüs a bénéficié d’une nouvelle médiatisation en décembre 2009, lorsque le procureur de Cologne lança une gigantesque perquisition dans une vingtaine de bureaux du mouvement, ainsi que des appartements appartenant aux cadres. Les soupçons portèrent sur «au moins 10 Millions d’Euros détournés» selon les dépêches d’agence. Le Kolnifche Rundfchau, journal de Cologne s’étonna que parallèlement à ce scandale «en même pas 16 mois, le Millî Görüs a été impliqué 3 fois pour des affaires de crimes d’honneur.»

Ce journal dressa la liste des griefs reprochés au mouvement islamiste, dont la question de l’interdiction fut immédiatement soulevée:

«La liste des allégations depuis l’été 2008 est longue: formation d’association de malfaiteurs, fraude, escroquerie sur fonds publics, collecte de fonds douteux, faux, détournement de fonds et blanchiment d’argent. Deux nouvelles enquêtes ont été diligentées par le procureur de Cologne sur le détournement des cotisations de sécurité sociale. Il devrait être d’environ de deux chiffres en millions de dollars, d’après les autorités qui ont lancé mercredi une opération d’envergure nationale dans 17 villes. Avec une médiatisation entachant la réputation du mouvement, le débat en vient à l’interdiction de la Communauté islamique du Milli Görüs (IGMG) (…). « La question de l’interdiction reste à l’ordre du jour », déclare un expert des affaires intérieures CDU Wolfgang Bosbach à Cologne. Avant que l’interdiction ne soit examinée, tous les documents compromettants vont être évalués. «Nous avons à traiter avec la plus grande communauté musulmane en Allemagne. Des tentatives de dissoudre l’organisation ont été répétées. Mais cela doit aussi avoir suffisamment de chances de succès», a déclaré le président de la commission du Bundestag sur les affaires intérieures.»

En France, quand les journaux locaux parlent des mosquées de l’organisation, aucune référence à son orientation extrémiste et ses déboires chez nos voisins ne sont évoquées.
La diaspora turque, au delà des activistes du Millî Görüs, n’a vraiment pas l’intention de s’adapter au mode de vie européen ainsi que lui commandent les autorités officielles turques, nous l’avons vu plus haut. Illustration de la naïveté des politiques, le plan d’intégration allemand littéralement snobé. En juillet 2007, l’Observatoire de l’islamisation rapportait le décalage entre ce plan dicté par des bons sentiments xénophiles et la réaction identitaire turque:
«Cela partait pourtant d’un sentiment généreux: 400 mesures pour faciliter l’intégration des étrangers, un budget de 750 millions d’euros. Jeudi dernier, les représentants d’une centaine d’associations d’immigrés ont assisté au second sommet pour l’Intégration. Tous les représentants des différentes communautés de Polonais, de Tchèques, de Portugais, de Croates étaient présents…une communauté manquait à l’appel, la turque. Les associations turques représentant 2,5 millions de colons ont boycotté le sommet. Le motif? Le contenu de la loi sur l’intégration qui vient d’être voté au Parlement. En effet, certains points d’exigences ont été mal perçus: l’impossibilité de faire jouer le regroupement familial pour les filles mineures, ce afin de limiter les mariages forcés, et la maîtrise d’au moins «à 300 mots d’allemand» selon la Ministre de la Justice Brigitte Zypries. Angela Merkel note à juste titre qu’il est courant que les femmes turques présentes depuis 2 ans sur le territoire «incapables de dire à un policier où elles vivent ou comment pourraient-elles être localisées».
Selon le leader de la «Communauté des Turcs en Allemagne», Kenan Kolat, ces mesures sont «discriminatoires ». Pour le journal à grand tirage turc Hurriyet Angela Merkel fait preuve de « racisme pur». Kenan Kolat met en garde la chancelière contre une insurrection de la jeunesse turque «à la française»: «Si la loi se maintient en ces termes je ne pourrais pas maintenir la jeunesse sous contrôle».
Le «Plan National pour l’Intégration» est pourtant d’une générosité rare, en augmentant les crédits pour des cours de culture et de langue allemande, en favorisant l’accès des enfants aux garderies permettant aux mères de se former dix nouvelles catégories de formations professionnelles. La Ministre de la Justice, dépitée, lâcha «C’est un véritable gâchis qu’une initiative si constructive, démocratique et avant-gardiste comme celle de Merkel soit perturbée par cette polémique»
Ou quand l’idéologie intégrationniste des progressistes mesure toute sa vacuité face aux réalités sociologiques de l’islamisme.
Pays-Bas : OPA sur la mosquée d’Amsterdam
Aux Pays-bas le Millî Görüs n’est pas plus modéré. En novembre 2004, le président de la section jeunes du mouvement, Mehmet Öztoprak, démissionna de sa fonction suite un article dans le journal professionnel De Journalist où Öztoprak niait entre autres l’holocauste, ne voyant que « tout au plus que quelques milliers » de victimes juives lors de la seconde guerre mondiale…
Dans le centre d’Amsterdam, le projet de « grande mosquée de l’Ouest » [Westernmoskee] dénommée de manière délibérément provocante « Aya Sofya » ( en grec correct, Aghia Sophia ; ou, en français, Sainte Sophie ; ce nom désigne, en turc, la cathédrale Sainte Sophie, transformée en mosquée après la prise de Constantinople par les Turcs en 1453) . La société De Manderen est-elle le bras financier du projet de l’association de la mosquée »Aya Sofya », nom local du Millî Görüs.
Mais le caractère islamiste du nouveau directeur de Milli Görus/Aya Sofya ne tarde pas à apparaître dès lors que l’association contesta une clause du contrat de gestion de la mosquée, précisément celle qui prévoyait d’y interdire les prêches radicaux….
Les premiers craquements eurent lieu à l’occasion de l’élimination du premier responsable d’Aya Sofya représentée par Haci Karakaer, jeune enseignant, réputé progressiste et proche des travaillistes au profil rassurant, remplacé par Fatih Uçler Dag, un islamiste bon teint.
En avril 2007, les liens entre Millî Görüs et les Frères Musulmans apparaissent au grand jour, mais Job Cohen, maire travailliste d’Amsterdam, commence par relativiser le danger du projet, qu’il trouve alors encore « sympa ». La rupture est cependant consommée quand Fatih Uçler Dag, le nouveau représentant local de Milli Görus, décide de se lancer dans un chantage pour faire avancer le projet :
« Si Amsterdam refuse de construire la nouvelle mosquée, la résistance sera énorme. Al Jazeera s’emparera de cette affaire. Si les autorités contrarient ce projet, il y aura des manifestations. Nous ferons appel aux Turcs de toute l’Europe. » Le représentant de Milli Görus ajoute qu’il espère que « ces manifestations seront non-violentes » mais qu’elles « pourraient dégénérer. Nos membres sont des gens passionnés, et il pourrait y avoir un déséquilibré parmi eux »
La mairie d’Amsterdam rompt alors tout lien avec Aya Sofya.
Le média français Riposte-laïque rapporte des suites judiciaires tout aussi inquiétantes : « Pour renfort de potage, De Manderen est sous le coup d’une enquête financière ; se présentant comme un fond d’investissement islamique, cette société aurait levé des fonds pour la mosquée en promettant aux pieux donateurs un retour sur investissement de 40 % ; son directeur, Uzeyir Kabaktepe, est accusé d’avoir transféré 1,3 millions d’euros sur ses comptes personnels ; et de plus, la police trouve chez lui une cache d’armes ; c’est d’autant plus surprenant et inquiétant que Kabaktepe était le seul « modéré » du groupe De Manderen. Etait-il moins modéré qu’on avait cru, ou a-t-il été piégé ? »

La France, nouvel eldorado du Millî Görüs
Interdit en Turquie, sur la voie de l’être en Allemagne, « grillé » aux Pays-Bas, la France devient objectivement une terre d’accueil évidente pour le mouvement, qui bénéficie déjà depuis de nombreuses années de l’hospitalité des maires, tous bords politiques confondus.
La France a été partagée par le mouvement en quatre zones, Paris, Strasbourg, Lyon, Annecy, chapeautées par un mouvement régional faisant le lien avec la direction continentale allemande. Le Département du développement organisationnel est le nom de la direction coordonnant les mouvements régionaux dans quinze pays européens. Selon le site Internet du Millî Görüs, cela représente pour l’Europe 514 mosquées, 87000 membres et 300 000 fidèles attirés à la prière du vendredi…

En France, le mouvement est en pleine expansion, ouvrant chaque année de nouvelles mosquées, soit sous la forme de salles modestes ou traditionnelle avec coupole et minaret.

Une cartographie des mosquées implantées en France montre un maillage du territoire surtout présent en région Rhône-Alpes avec des associations (allant de paire avec une mosquée) à Albertville, Annecy, Annemasse, Bellegarde, Chambery, Nantua, Oyonnax, Grenoble, Sallanches,Ugine, Vénissieux, Le Creusot, la Roche-sur-Foron, Saint-Etienne. En Auvergne Clermont Ferrand. La région Rhône-Alpes abrite 23 mosquées du mouvement. En Paca, le mouvement est présent à Salon-de-Provence et Avignon . Les régions Alsace et Lorraine sont aussi des terres de prédilection, le Millî Görüs ayant des associations affiliées à Mulhouse, Strasbourg, Colmar, Haguenau, Metz, Neufchâteau, Morhange, Saint-Avold, Saverne, Niederhaslach. Une présence du mouvement est aussi notée à Belfort en Franche-Comté. La région Ile-de-France n’est évidemment pas épargnée surtout dans les zones où se concentrent les colonies de l’immigration à Fontenay, Montfermeil, Mantes-la-Jolie, Grigny, Sarcelles, Poissy, Sevran. La Picardie commence à être grignotée à Beauvais et à Creil. Dans le cœur historique de la France, Montargis, Châteaudun, Vendôme et Blois abritent également l’organisation. Dans le Sud-Ouest, seules les villes de Bordeaux et Angoulême sont concernées.

Cette impressionnante liste montre à quel point l’immigration turque s’implante en France, drainant son lot d’islamistes et de mosquées défigurant l’hexagone, lorsqu’elles arborent ostensiblement coupoles et minaret comme à Vénissieux.

Les élus ne mesurent pas le danger islamiste. La ville d’Annonay en Ardèche présente dans son « annuaire des associations et des clubs » la Communauté Islamique du Milli Gorus (CIMG). La description de son « activité » est bien étudiée pour donner une image sympathique « 5 prières de la journée, fêtes religieuses, éducation culturelle des jeunes (baby foot, sports, jeux vidéos…) ainsi que les fêtes familiales et culturelles. »

A Vénissieux, la courte échelle communiste

Le virage purement opportuniste d’André Gérin ne doit tromper personne, car en poste, il était prêt à tout afin d’obtenir les voix des islamistes. Un des acteurs directement concerné, Abdelaziz Chaambi, membre fondateur de l’Union des Jeunes Musulmans qui invita Hani Ramadan à donner une conférence en 2006, donne des informations de première main :
« Le plus surprenant et non moins scandaleux c’est que ces deux députés [André Gérin et Christian Philippe]ont eu des rencontres dans les mosquées et dans des locaux associatifs avec les adeptes de Monsieur Hani Ramadan à Lyon avant les dernières élections municipales et législatives. Monsieur André Gérin leur avait même proposé aux responsables de l’Union des Jeunes Musulmans trois postes au conseil municipal s’ils s’engageaient à ses côtés, il n’avait aucune gêne à venir à plusieurs reprises dans les mosquées de Vénissieux draguer le vote musulman par l’intermédiaire de l’Imam Ben Chellali. Il s’est même rendu à Guantanamo pour aider deux jeunes de Vénissieux emprisonnés alors dans ce camp. Quand à Monsieur Christian Phillipe, il s’était rendu dans les locaux d’une association lyonnaise pour demander l’aide des associations musulmanes proches de Hani Ramadan pour les dernières élections législatives, en promettant de les aider une fois élu. »

Dans la région l’UOIF (proche de l’UJM) avait fait liste commune avec le Millî Görüs lors des élections de juillet 2005, les convergences de vues sur le retour du califat et la nécessaire production d’une contre-société islamique dégagée des influences occidentales. Necmettin Erbakan n’avait-il pas rencontré le chef des Frères Musulmans (fils de Hassan al-Banna) lors d’un voyage en Egypte en 1996 afin de renforcer une collaboration, ce qui provoqua l’ire de Hosni Moubarak à l’époque ? C’est en Allemagne que la collusion entre les deux mouvements est la plus limpide. Ibrahim al-Zayat qui dirige la branche allemande des Frères (IGD), est marié à Sahiba Erbakan, nièce de Necmettin et sœur de Mehmet Sabri qui dirigea lui le Millî Görüs allemand (IGMG) jusqu’en 2002. Ils collaborent au sein de l’Association des étudiants musulmans allemands où Ibrahim al-Zayat fut directeur et Mehmet Sabri Erbakan son adjoint. Aussi, Ibrahim al-Zayat dirige la très puissante Société européenne de construction et de soutien aux mosquées (EMUG), qui a contribué à financer 300 mosquées du Millî Görüs en Allemagne.

André Gérin ne drague pas seulement les électeurs sunnites maghrébins comme le suggère le témoignage de Abdelaziz Chaambi, mais a été un des premiers soutiens du projet pharaonique du Millî Görüs à Vénissieux. Le 22 novembre 2008 André Gérin, posait la première pierre de la gigantesque mosquée « Eyup Sultan » dans cette ville.

Le quotidien Le Progrès évoqua la genèse du projet dans un article d’ avril 2006 : « Les discussions engagées avec la municipalité de Vénissieux ont abouti à la fin de l’année 2004 à un troc : l’association a échangé son terrain aux Minguettes contre 4000 mètres carrés, propriété de la communauté urbaine ». Puis un protocole d’accord fut signé à l’hôtel de ville en juillet 2006 entre le Millî Görüs, la Ville, le Conseil régional du culte musulman, la préfecture et le Grand Lyon. Le permis de construire fut signé le 14 décembre 2006 en mairie.

Médiatiquement, André Gérin a tenu à marquer le coup afin de marquer son implication en organisant en janvier 2007 une « cérémonie officielle de signature » à l’Hôtel de ville. Le journal l’Expression rapporte l’ambiance chaleureuse qui règne entre les islamistes et la mairie communiste : « Il s’agissait de mettre en valeur ce projet qui marque une étape supplémentaire dans la normalisation du culte musulman. Le maire a saisi l’occasion pour
réaffirmer la volonté de la municipalité de « désormais travailler à l’édification d’une future grande mosquée à Vénissieux, de façon à redonner sa dignité à la pratique de l’islam et fermer progressivement les lieux de cultes installés dans les caves en bas des immeubles ». Très ému de voir aboutir le projet porté par son association depuis une quinzaine d’années, Erhan Ozcan a salué le travail mené par la municipalité, avec un hommage particulier à Henri Thiviliier, adjoint au maire chargé de l’urbanisme ‘ qui a tout fait pour faire avancer le dossier’ ». Et on comprend Erhan Ozcan, car il y avait une marge entre la salle de prière du bas de l’immeuble ( image caricaturale et fausse, destinée à culpabiliser les français et leur accepter des mosquées-cathédrales) -ce qui n’était pas le cas de l’association qui jouissait déjà d’un local convenable- et le projet pharaonique accepté en mairie : le projet, sur 1150m2 au sol, couronné de 4 minarets (à l’image de la mosquée d’Istanbul) est ambitieux « loin d’être seulement un lieu cultuel avec deux salles de prière et une troisième pour l’éducation religieuse des enfants, l’équipement aura une vocation socio-culturelle marquée en accueillant une bibliothèque et des espaces dédiés aux expositions, aux conférences, à l’aide aux devoirs, au multimédia, aux « jeux ». Sans oublier les bureaux de l’association, un restaurant ouvert à tous » rapporte Le Progrès. On peut rajouter que huit salles de classes seront intégrer à l’ensemble, « pour apprendre le turc » explique Cihat Yilmaz, responsable du secteur éducation de la mosquée sur le site Internet de celle-ci.

Etonnant, les premiers opposants au projet ne furent pas des riverains ou des mouvements politiques patriotiques, mais d’autres associations musulmanes turques, ne connaissant que trop bien le profil radical du Millî Görüs. Bahri Aktas, président de l’association culturelle et cultuelle turque de Lyon et de la région Rhône-Alpes accuse André Gerin, d’avoir délivré le permis de construire en 2006, sans “réunir toute la communauté turque autour de la table “. Il a négocié le projet de Mosquée avec une seule association : Milli Gorus, “très politisée “ selon lui rapporte le média Lyoncapitale.fr

Jusqu’ici, tout allait bien, mais c’était sans compter sur une poignée de riverains pas enchantés de voir une mosquée géante à leur porte, craignant certainement une dépréciation de la valeur de leur logement. Car suite de la requête groupée de six riverains, le tribunal administratif de Lyon estima lundi 7 décembre 2009 que les 65 places de stationnement prévues dans le permis de construire, n’étaient pas suffisantes par rapport à la capacité d’accueil de l’édifice. Pour rendre sa décision, le tribunal s’appuya sur un jugement du tribunal administratif de Nantes, qui fait jurisprudence en la matière, et qui avait abouti à l’annulation du permis de construire d’une mosquée pour la même raison dans l’agglomération nantaise.

Levée de bouclier à la mairie de Vénissieux, où André Gérin a installé à sa suite sa collègue communiste Michèle Picard lors d’un conseil municipal extraordinaire de juin 2009. Celle-ci monte au créneau pour défendre les islamistes malmenés par le tribunal administratif :
« Je considère maintenant qu’il s’agit d’un problème technique auquel on va essayer de trouver une solution technique » rapporte Lyoncapitale.fr « On va faire appel et essayer de sortir par le haut de cette situation ( …) Un autre permis de construire pourrait être déposé. Une convention pourrait aussi être signée avec Emmaüs qui possède une antenne juste à côté de la mosquée avec des places de parking. Il s’agit de pistes de travail.
Mais Michèle Picard se dit quand même « étonnée de l’argument du tribunal dans le sens où, pour tous les équipements d’intérêt général (sic) la question du stationnement se pose, pour tous les gymnases, la maison de la danse, ou les stades qui n’ont pas toujours le nombre de places de parking suffisantes » déplore la maire. Cela dit, Michèle Picard réaffirme sa “ vision volontariste de choses. La ville a soutenu seule ce dossier jusqu’à présent, « il doit maintenant être porté par le Grand Lyon », affirme la maire de Vénissieux. En voilà un projet sympathique pour les habitants du Grand Lyon !

La collaboration enthousiaste d’une mairie communiste à l’édification d’une Grande mosquée dirigée par le mouvement de Necmettin Erbakan ne manque pas de sel, vu l’anticommunisme viscéral de celui qui animait ses meetings politiques avec des chansons satiriques, dont celle-ci : « sur le crâne des gauchistes, sur les loges des maçons, sur la constitution des turques, nous écrirons que la voie juste est l’islam ». Thierry Zarcone, chercheur au CNRS et spécialiste de la Turquie explique : « Erbakan prévenait les maçons, les sionistes et les communistes, dont son parti refusait toute carte de membre, qu’ils incarnaient tous les dangers : l’irréligion, l’amoralité, le cosmopolitisme, l’internationalisme, l’occidentalisme et le capitalisme ».

Soit bien des catégories incarnées par des communistes à bout de souffle, contraints de s’allier avec leurs pires ennemis (qui les instrumentalisent sans scrupule pour obtenir leurs mosquées), afin de tenter de survivre dans le paysage politique français d’aujourd’hui. Sans honte et dans la tradition de l’histoire jalonnée d’impostures du PCF français, André Gérin a voulu se placer comme un grand défenseur de la république laïque en 2009 en demandant la création d’une commission parlementaire sur le port du voile intégral, débouchant au final sur une mission d’information dont il prit la présidence. Son mot d’ordre « Face au fondamentalisme, il faut sortir de l’aveuglement ». Ce qui prêterait à rire si la situation de notre pays n’était pas aussi grave.

La grande mosquée de Metz avec le Millî Görüs

Dominique Gros, maire socialiste de Metz, proposa au conseil Municipal du 31 octobre 2013 l’affectation par bail emphytéotique d’un terrain municipal de 1200 m2 à l’Union des Associations Cultuelles et culturelles des musulmans de Metz (UACM). Un bail emphytéotique est un bail immobilier de très longue durée. Dans ce cas précis, la durée maximale envisagée est de 99 ans. Ce bail confère au preneur un droit réel sur le terrain donné à bail. À lui ensuite d’améliorer le fonds et de payer un loyer modique. Ici, il s’agira d’un loyer annuel d’une somme symbolique.
L’UACM est composée de cinq associations musulmanes, dont trois turques. Parmi elles, l’association turco-islamique proche du DITIB, le ministère des Affaires islamiques turcs (Dyanet), et l’ultra islamiste Milli Görüs (CIMG).
L’Est Républicain du 1er novembre 2014 rapporte :
« Metz. Sans surprise, la majorité municipale a voté la motion de mise à disposition d’un terrain [ 12000 m2 ] par bail emphytéotique de 99 ans pour un loyer annuel de 15 € à l’Union de cinq associations musulmanes. Celles-ci disposent désormais de 3 ans pour financer le projet de mosquée et déposer un permis de construire (L’ER du 30 octobre). (…) Pour Emmanuel Lebeau (divers droite), « le projet est mal abouti et mal construit ». Au loyer de 15 € par an décidé par la mairie, il préfère l’estimation des Domaines, 2.000€ annuels. »
Un cadeau de 1975 euros par an pour mettre à disposition le terrain municipal donc.
L’UMP soutient aussi le projet. La député de la 3ème circonscription de Moselle, Marie-Jo Zimmerman (membre du groupe UMP à l’assemblée) vint en personne pendant la campagne des élections municipales 2014 à la mosquée actuelle des turcs, avec un voile sur la tête, pour promettre son soutient à la Grande mosquée en cas d’accès à la mairie. Une vidéo fut filmée a enregistré son discours, où Zimmermann se voit déjà maire :
« Je vous invite au lendemain de mon élection à me rencontrer, et c’est moi qui ferai l’invitation. C’est pas eux [les musulmans] qui me demanderont au bout de cinq ans bah tout simplement où en est le projet, non, c’est moi qui les inviterai. C’est moi qui respectueuse de la liberté de culte, je les inviterai et je dialoguerai avec eux de façon à voir comment les uns et les autres se retrouvent dans ce projet de Grande mosquée, et comment les uns et les autres continueront à pratiquer dans leur lieux de culte »
Interrogée par TV Libertés sur cette visite toute de voile islamique vêtue, l’élu UMP se justifie « Ces gens sont des Messins comme les autres Messins, et à partir où ces gens m’invitent et souhaitent me rencontrer, et dialoguer avec moi, je ne vois pas en quoi cela pose un problème. C’est très clair. Je suis aujourd’hui dans le cadre de ma campagne aux municipales, je rencontre les musulmans Messins »
Seul le Front National s’opposa à ce projet de Grande mosquée turque. Françoise Grolet, qui réalisa 22% aux élections municipales 2014, communiqua :
« Dans la lignée du tract en turc du député UMP Denis Jacquat en 2007, ce discours communautariste de Marie-Jo Zimmermann (sur lequel elle n’a curieusement pas communiqué) est repris dans un tract électoral distribué récemment aux habitants de Borny. (…) Françoise Grolet et la liste du Rassemblement Bleu Marine Pour Metz dénoncent les dérives communautaristes auxquelles mène la recherche forcenée d’électeurs de substitution. Ces reniements ne payent plus, les citoyens ne cessent de nous dire, pendant cette campagne, leur écoeurement d’être ainsi manipulés par l’UMPS. »
Effectivement, le tract électoral UMP de Marie-Jo Zimmermann pour cette campagne fait référence au projet de mosquée : « Les lieux de cultes seront le socle d’une démarche de dialogue, de partage et de solidarité. Suivi du projet de Mosquée et création du Triangle d’Or autour des trois lieux de cultes (Eglise, Mosquée , Synagogue) »
La mise en parallèle de l’islamisme aujourd’hui au pouvoir en Turquie incarné par la Grande mosquée, et les églises de Metz, traduit un relativisme d’une grande naïveté.
Il faut dire que Zimmermann avait trouvé son poisson pilote pour draguer la communauté musulmane, en la personne de Naima Hassani, colistière qui fit campagne dans les quartiers musulmans. Dans une lettre de propagande électorale envoyée à tous les habitants, les invitant à voter Zimmermann, elle rappelle qu’elle a « créé l’association DOUNIA, le monde en langue arabe » afin d’aider les arabophones maitrisant peu la langue française à trouver un emploi.

La mosquée de Châteaudun avec son imâm colistier
Le 22 juin 2014, le maire de Châteaudun en Eure-et-Loir, Alain Venot, assista à l’inauguration de la mosquée de la Confédération Islamique du Milli Gorus (CIMG). Et pour cause, l’imâm, Ali Yurt, était sur sa liste aux municipales 2014 ! Ali Yurt siège désormais au conseil municipal dans la majorité de droite. Le mairie a pu gagner les électeurs turcs de cette bourgade du Centre, région où la diaspora turque s’implante de plus en plus.

L’Echo Républicain rapporta:

« Parce que les enfants de la communauté turque sont nombreux à avoir des problèmes scolaires, Ali Yurt souhaite proposer une aide aux devoirs et aussi, « pour qu’ils ne perdent pas leurs racines », une classe d’arabe et de turc. L’enseignement de l’islam sera avant tout une école de bonne conduite. « Nos parents sont venus de Turquie. Nous, pour la plupart, nous sommes nés en France, nos enfants aussi et nous voulons leur donner une éducation et un espoir. »

Le même quotidien rapporta au lendemain de l’inauguration :

«J’espère que cela sera le bon endroit pour éduquer nos enfants, et que cette mosquée sera bénéfique pour notre communauté. » C’est en ces termes que Mohamet Turhan, membre autrichien de la Confédération islamique du Milli Görüs, a inauguré, hier en début d’après-midi, la mosquée de la communauté turque de Châteaudun »

L’édifice, décoré de faïences sur le modèle des mosquées de Turquie, se compose de deux parties. A l’étage se trouvent une grande salle de prière et une salle réunion. Deux salles de classe proposeront au rez-de-chaussée de l’aide aux devoirs aux enfants, des cours d’islam et un enseignement des langues arabe et turc.
Le maire fut député de la 4ème circonscription d’Eure-et-Loir de 2002 à 2007 siégeant au groupe UMP. Maire durant quatre mandats jusqu’en 2008 où il perdit temporairement son siège, il rejoint le mouvement République solidaire de Dominique de Villepin en 2010. Calcul payant de sa part, Villepin étant proche du Qatar et islamophile, l’étiquette UMP pouvant rebuter les électeurs turcs, ce parti étant contre l’entrée de la Turquie en Europe, à la différence de l’ancien Premier ministre…