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30 décembre 2020 | Maroc

Maroc : les islamistes du gouvernement critiquent la normalisation avec Israël

La reprise de relations diplomatiques officielles avec Israël par le Maroc n’est pas du goût des islamistes marocains, qui, après avoir un temps dirigé le parlement avec Abdelilah Benikrane (2011-2017), contrôlent aujourd’hui plusieurs ministères dont le poste du Premier ministre par Saad Dine El Otmani. Ces islamistes politiques sont tous membre du Parti Justice et Développement. Otmani est un spécialiste de la charia, ayant une licence en droit musulman, un magistère en loi islamique obtenu à Dar al-Hadith al-Hassania et un diplôme supérieur en études islamiques !

La journaliste marocaine Zineb Ibnouzahir pose la question que se posent de nombreux Marocains : « Jusqu’à quand les islamistes vont-ils brandir leur double casquette de membre de parti et de minis- tre pour justifier la tenue de propos qui vont à l’encontre de l’unité du pays et, en l’occurrence, de décisions royales ! »

Le fin connaisseur du royaume Alain Sanders s’interroge dans le quotidien Présent : « Le ministre de l’Emploi et de l’Insertion professionnelle, Mohamed Amekraz également du PJD, est allé directement s’épancher sur la chaîne Al Mayadeen, proche de l’Iran en général et du Hezbollah chiite en particulier. Une première provocation : depuis 2012, le Maroc a rompu toutes relations avec l’Iran et Rabat se défie du Hezbollah, soutien avéré de la créature de l’Algérie au Sahara occidental, le Polisario. »

Seconde provocation, la prétention d’Amekraz de s’exprimer « au nom de tous les Marocains » en dénonçant la reprise du dialogue entre Rabat et Tel-Aviv. Citons encore Zineb Ibnouzahir : « Qui lui a donné le droit de parler en notre nom ? Sur quoi se base cette certitude que tous les Marocains sont contre cette déci- sion ? Une étude ? Un sondage ? L’affirmation de monsieur le ministre repose sur son sentiment personnel et ses affirmations, erronées et dangereuses, relèvent soit d’une bêtise sans nom, soit d’une grossière imposture, soit des deux en même temps. »

Le Palais royal n’ayant pour l’heure pas réagi à cette double provocation, le ministre islamiste Amekraz a remis ça. Sur France 24. Son ministère ne relève ni des affaires étrangères ni des relations diplomatiques (le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, n’est pas PJD et tout au contraire) ? Il n’en a cure.

Alain Sanders analyse dans Présent :

« On notera, une fois de plus, qu’un islamiste sunnite n’hésite pas à s’aboucher avec des islamistes chiites radicaux. Ce qui devrait alerter le Palais royal qui, de- puis des années (confiant de pouvoir siffler la fin de la récréation au cas où), joue un jeu dangereux avec les islamistes (installés au cœur même du gouvernement). Au risque de les voir, un de ces jours, s’en prendre directement – après l’avoir fait et continuer de le faire sournoisement – à la monarchie. L’histoire ne se répète pas ? Peut-être. Mais le sort du malheureux shah d’Iran, roulé dans la farine puis chassé par les dingos d’Allah, devrait in- citer S.M. Mohammed VI à la plus grande prudence.

En attendant, et malgré les vociférations islamistes, le premier vol entre Israël et le Maroc a atterri la semaine dernière à l’aé- roport de Rabat-Salé. Le 22 décembre, le conseiller à la Sécurité nationale d’Israël, Meir Ben-Shabbat, a été reçu par le roi. Fidèle à ses origines marocaines, Ben- Shabbat s’est adressé au monarque en darija, cet arabe marocain spécifique, langue à part entière à laquelle tous les

« Vieux Marocains » (comme nous ai- mons nous désigner) sont très attachés. »